Alors que la Norvège a dépassé son pic de production de pétrole en 2000, le pays dispose encore des plus importantes ressources en hydrocarbures d’Europe. En 2023, la Norvège se hissait à la troisième place des pays exportateurs de gaz et à la onzième place des pays exportateurs de pétrole dans le monde. En tout état de cause, Oslo cherche désormais à diversifier son économie afin d’accompagner sa transition vers une économie décarbonée. En misant sur la puissance de son fonds souverain et en renforçant son attractivité auprès des investisseurs étrangers, la Norvège concentre désormais ses efforts sur le développement des secteurs secondaire et tertiaire.
Avec le Government Pension Fund Global (GPFG), la Norvège s’est dotée d’un outil financier hors norme destiné à sécuriser son avenir économique et social. Le Government Pension Fung-Global est aujourd’hui le plus grand fonds souverain au monde, avec un capital estimé en 2025 à plus de 1 500 milliards de dollars. Alimenté par les revenus excédentaires des exploitations de gaz et de pétrole, le fonds alimente le budget national à hauteur de 3 % par an, permettant notamment de subvenir aux dépenses sociales de l’État norvégien, tout en stabilisant l’économie nationale face au risque de variation des cours d’hydrocarbures. Le GPFG détient également 1,5 % des actions cotées à l’échelle mondiale, ce qui contribue à la croissance de sa valeur. Géré par la Norges Bank Investment Management (NBIM), le GPFG concentre la totalité de ses investissements dans soixante-dix pays étrangers, dont la France. Afin d’éviter de potentiels déséquilibres de l’économie nationale, les entreprises norvégiennes sont exclues du fonds d’investissement. De même, les groupes étrangers développant des activités en Norvège ne sont pas intégrés au processus de sélection d’investissements, pour éviter les conflits d’intérêts et préserver la neutralité du marché intérieur. Le portefeuille du GPFG est majoritairement composé d’actions - principalement d’entreprises de technologie, comme Apple, Microsoft et NVIDIA - mais près de 30 % des investissements concernent des obligations et de l’immobilier.
Malgré son envergure, le fonds souverain reste exposé aux fluctuations des marchés financiers. Au premier trimestre 2025, le GPFG a ainsi enregistré une perte de près de 35 milliards d’euros, en raison des variations des valeurs technologiques et de la polémique suscitée par les discussions sur la mise en place de droits de douane par Washington. Régi par des principes éthiques et environnementaux, le fonds intègre également des critères liés à la transition écologique dans ses choix d’investissement. Plus que d’autres fonds souverains de pays riches en hydrocarbures, à l’instar des pays du Golfe, le GPFG répond à de fortes exigences de transparence portées par la société civile norvégienne. Les transactions financières et les investissements du fonds sont ainsi en libre accès, ce qui permet de renforcer la confiance du public et des partenaires internationaux.
Depuis les années 2000, la Norvège a adopté une stratégie d’ouverture économique progressive afin d’attirer les investissements étrangers, tout en conservant le contrôle sur ses secteurs stratégiques. La création de l’agence publique « Invest in Norway » en 2004 est un exemple fort qui illustre la volonté de la Norvège d’attirer des capitaux étrangers pour renforcer le financement de son tissu économique national. Alors que les années 1990 étaient marquées par une certaine prudence, avec une volonté de préserver l’indépendance économique du pays, le gouvernement a révisé sa position dans les années 2000 en ouvrant de nouveaux secteurs aux investisseurs étrangers, tels que les infrastructures ferroviaires. Cette ouverture s’est accompagnée d’un souci constant de maîtrise des leviers économiques stratégiques. L’État norvégien continue de gérer 74 entreprises publiques qui concentrent leurs activités dans les secteurs des énergies, de la finance et des transports.
Pour accroître l’attractivité du pays, la Norvège mise également sur une fiscalité compétitive, avec un taux d’imposition sur les sociétés fixé à 22 %, contre 25 % en moyenne dans l’Union Européenne. À cela s’ajoutent des allégements de cotisations sociales pour les entreprises implantées dans les zones moins densément peuplées du nord, notamment dans les comtés de Finnmark et de Troms. Par ailleurs, bien que la Norvège ne soit pas membre de l’Union Européenne, elle a progressivement harmonisé ses normes afin de les rendre compatibles avec le cadre réglementaire de Bruxelles. L’enjeu est de faciliter les échanges et les investissements en Norvège, pour les acteurs locaux et étrangers.
Enfin, l’intérêt national pour les investissements étrangers s’exprime par le développement d’incitations financières pour la Recherche et le Développement, notamment dans le cadre du projet « Innovation Norway ». Selon les données de la Banque mondiale, les prêts et les incitations financières s’élèvent à 1.94 % du PIB norvégien en 2021. Toutefois, ce taux reste moins prononcé qu’en France et aux États-Unis, où les programmes atteignent respectivement 3.46 % et 2.22 % de la richesse nationale.
La Norvège présente un environnement attractif pour les investissements étrangers, appuyé par une offre diversifiée de secteurs économiques. Toutefois, sa dépendance aux fluctuations des prix des hydrocarbures et le coût élevé de la vie constituent des freins à l’essor de son économie.
L’industrie énergétique demeure un pilier de l’économie norvégienne. La Norvège produit 2 millions de barils de pétrole par jour et poursuit l’exploration de nouveaux gisements de gaz et de pétrole. En mars 2025, la compagnie d'énergie pétrolière et éolienne norvégienne Equinor, a annoncé la découverte de gaz et de condensats en mer de Norvège, dans le puits d'exploration Mistral Sø, avec des estimations de 19 à 44 millions de barils de réserves prouvéesde pétrole en mer de Norvège.
Parallèlement, la Norvège mise sur les énergies renouvelables et ses ressources naturelles maritimes, notamment en mers de Barents, de Norvège et du Nord. Le pays a développé de vastes projets offshores, principalement dans l’éolien et l’hydrogène vert. Ce dernier occupe une place croissante dans la stratégie énergétique nationale, avec un potentiel d’exportation élevé à moyen terme. Le secteur de l’électricité est ouvert aux investisseurs étrangers, bien que leur participation soit plafonnée à 20 %, selon des règles définies par le gouvernement. Cette dynamique confirme la volonté du pays de conjuguer sécurité énergétique, transition verte et attractivité économique.
La diversification de l’économie norvégienne passe aussi par le renforcement des innovations technologiques, en faisant un levier clé pour attirer les investissements étrangers. Cette dynamique se concrétise par le développement de start-ups implantées autour d’Oslo et de Bergen, spécialisées dans le domaine de l’intelligence artificielle et de la recherche médicale. Des entreprises comme Vespa.ai, qui développe des outils d’IA pour automatiser le développement d’applications, ou KinSea Lead Discovery, spécialisée dans les bio actifs marins pour la lutte contre le cancer, ont récemment suscité l’intérêt d’investisseurs internationaux lors de leurs levées de fonds.
Les secteurs de la défense et de l’aérospatiale occupent également une place stratégique dans l’économie norvégienne. Ces activités sont portées depuis des décennies par les exportations, appuyées par les partenariats entre la Norvège et les membres de l’Otan. Selon les données de l’OEC World, plus de 80 % de la production industrielle de défense est exportée vers le Royaume-Uni, l’Ukraine, la Pologne, la Lituanie et les Pays-Bas.
En janvier 2025, un partenariat public-privé est conclu entre la Norvège et les États-Unis pour permettre le lancement de satellites américains depuis la base d’Andøya, une entreprise norvégienne spécialisée dans le domaine de l’aérospatiale.
Oslo comptabilise près de quarante entreprises spécialisées dans l’aérospatiale, dont la multinationale Kongsberg. Leurs principaux domaines d’expertise concernent les systèmes d’intégration, la technologie sous-marine, les missiles et les munitions. Un effort considérable est effectué pour produire des satellites de télécommunications, en dépit de coûts de production nettement plus élevés qu’en Inde ou en Chine.
Somme toute, la Norvège offre de nombreuses opportunités d’investissements, soutenues par un contexte politico-économique favorable. Le pays bénéficie d’une stabilité politique durable, d’un taux de criminalité très bas et d’une économie ouverte et transparente, classé 4e au monde selon l’indice de perception de la corruption de Transparency International. En tant que membre de l’Espace économique européen (EEE), la Norvège offre un accès facilité au marché européen, ce qui en fait un point d’entrée stratégique vers l’Europe du Nord pour les investisseurs nord-américains et asiatiques.
Cependant, l’économie de la Norvège reste encore dépendante des fluctuations des prix du pétrole et l’inflation soutenue en 2023 maintient le coût élevé de la vie selon les données de la Banque mondiale. Si la main-d'œuvre est très qualifiée, les coûts salariaux élevés limitent la compétitivité dans certains secteurs. Par ailleurs, l’engagement fort de la Norvège dans la transition écologique implique des régulations strictes en matière de transparence et de normes environnementales. Le secteur de l’énergie, principal atout du pays, privilégie les entreprises norvégiennes, bien que les capitaux étrangers soient nécessaires pour pérenniser les activités. Enfin, le marché interne reste assez limité mais peut néanmoins servir de tremplin vers les marchés du nord de l’Europe, notamment dans les domaines de l’énergie, de la tech et des transports.
Dans ce contexte, pour les investisseurs, il est essentiel de réaliser une veille ciblée des indicateurs économiques et politiques. La gestion rigoureuse de ces indicateurs de risques peut permettre de saisir des opportunités d’affaires, en limitant de potentielles répercussions sur les investissements. Risk & Ops peut vous accompagner opérationnellement dans la gestion de ces risques. Prenez contact avec nous contact@riskandops.fr.